La vie d’ados dans un centre de détention polonais immortalisée par Zuza Krajewska

Publié le par Donnia Ghezlane-Lala,

© Zuza Krajewska

La photographe a figé la transition et la transformation de mineurs qui ont commis des crimes.

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Des gueules, des cicatrices, des poings meurtris, des tatouages à l’aiguille, une lumière froide, des bois. La photographe Zuza Krajewska a passé une année aux côtés de jeunes délinquants dans un centre de détention polonais, à Studzieniec. Le titre de sa série, Imago, renvoie à la dernière phase de métamorphose d’un insecte, à l’âge pré-adulte, quand il s’offre au monde dans sa forme finale mais réduite.

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C’est de cela dont il est question. Krajewska a figé la transition, la transformation de ces mineurs avant qu’ils n’embrassent la maturité et la norme imposées par le passage à la dix-huitième année. Ces hommes aux crânes aussi rasés que leurs rêves sont entrés dans ce centre pour des crimes qui leur auraient coûté la prison s’ils avaient été majeurs.

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© Zuza Krajewska

Incapables de s’adapter à la société, de suivre ses codes, ils ont fini à Studzieniec, à cinquante kilomètres de Varsovie. Ce centre réinsère des jeunes depuis 145 ans. Il a été fondé sans l’aide du gouvernement, avec la simple solidarité citoyenne. Le travail et le contact avec la nature sont au cœur de l’approche des éducateur·rice·s. Il y a un terrain de football, des étables, des animaux, des champs et des ateliers…

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“Pour beaucoup de gamins qui vont à Studzieniec, c’est la première fois de leur vie que personne ne les bat ou ne les brutalise, qu’ils expérimentent un rare moment de paix et de calme. Pour beaucoup, c’est la première fois de leur vie qu’ils se sentent voulus, appréciés, à l’abri du danger. La première fois qu’ils comprennent que leur vie vaut quelque chose”, écrit la photographe dans son ouvrage publié aux éditions Kahl.

© Zuza Krajewska

“Au début, […] je me rappelais de chaque chemin retour de Studzieniec. Je me rappelais de chaque mot que l’équipe et les enfants m’avaient dit à propos de leur mère et de leur père, à quel point ils étaient alcooliques pour toujours, cruels, […] stupides”, explique-t-elle en partageant son sentiment d’impuissance. “Quand un garçon débarque, il est surpris, il se sent coupé du monde, exilé dans la nature sauvage. Pas de discothèques, de sexe, de drogues.”

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Loin du sensationnalisme, Zuza Krajewska livre des portraits sensibles, de ces enfants qui ont hérité de ce “mal” par leurs parents, qui ont été abandonnés et qui doivent regagner leur espoir. Il a fallu un temps d’adaptation pour que ces jeunes acceptent que la photographe documente leur vie et leur vulnérabilité. Ses photos défient même la violence et la masculinité exacerbée qu’on pourrait leur coller : ils rient en reproduisant La Cène, ils se blessent, ils s’attendrissent devant un oiseau ou un lapin, ils ouvrent leur regard et découvrent l’autre monde qui les attend.

© Zuza Krajewska
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Couverture de l’ouvrage <em>Imago</em> de Zuza Krajewska, publié aux éditions Kahl.

Imago de Zuza Krajewska est publié aux éditions Kahl.