À Beyrouth, une statue créée à partir des débris de l’explosion se dresse sur le port

À Beyrouth, une statue créée à partir des débris de l’explosion se dresse sur le port

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© Hayat Nazer

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Par Lise Lanot

Publié le

Grâce à ce mémorial, l'artiste Hayat Nazer souhaite donner de la force à son pays tout en rappelant la catastrophe.

Mardi 4 août 2020, la panique cédait sur le port de Beyrouth après deux puissantes explosions causant la mort de plus de 200 personnes, laissant au moins 6 500 blessé·e·s et plus de 300 000 personnes sans domicile. Déjà touché par une situation politique et sociale désastreuse, le pays a subi de plein fouet les répercussions de la catastrophe. Sans aide gouvernementale, ce sont les citoyen·ne·s qui ont dû se mobiliser pour sortir de cette atmosphère apocalyptique.

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C’est justement en nettoyant les débris causés par l’explosion que l’artiste Hayat Nazer a eu l’idée de créer Lady of the World (un nom provisoire, elle souhaite laisser les internautes choisir son nom définitif), une sculpture-mémorial créée à partir des décombres :

“L’explosion m’a brisé le cœur. J’étais dévastée. J’étais traumatisée, mais honnêtement, nous sommes tous traumatisés au Liban. Quand je ressens ce genre de choses, je veux juste essayer d’aider, de réparer et soigner les choses grâce à l’art. Ceci est ma façon d’accepter la réalité et d’aider mon pays à se relever”, s’est épanchée la sculptrice auprès de CNN.

“Rendre compte de la vérité et de la souffrance”

Aussitôt dit, aussitôt fait. Le 30 août dernier, elle publiait une vidéo sur son compte Instagram dans laquelle elle appelait les Libanais·e·s à lui faire parvenir des “objets cassés porteurs de sens, comme des cadres de photo, des chaises en bois ou des montres cassées”.

Un mois plus tard, la statue est prête : cheveux au vent et bras tendus vers le ciel, brandissant le drapeau libanais ou un flambeau, Lady of the World est faite de morceaux de verre, de céramique et de métaux, ainsi que d’objets personnels offerts par des compatriotes à l’artiste. Au pied de la sculpture, une horloge indique, à jamais, 18 heures 08, l’heure exacte de la première explosion.

© Hayat Nazer

Pour le moment, la statue trône fièrement sur le port beyrouthin, lieu de l’explosion, mais Hayat Nazer a confié la semaine dernière qu’elle allait bientôt “quitter le port” par peur qu’elle soit détruite. Quoi qu’il en soit, l’artiste souhaite créer une “réplique bien plus grande et pérenne” de Lady of the World. Ce mémorial, affirme-t-elle, a pour but de “rendre compte de la vérité et de la souffrance, de préserver les souvenirs mais aussi de redonner de la force” au peuple libanais et de viser une renaissance de leurs cendres.

Enfant de la guerre civile, Hayat Nazer n’a “jamais connu son pays en paix”. Son art est imprégné de sa volonté de voir son pays revivre et enfin sortir de la corruption de ses politiques. Dans la même veine que sa Lady of the World, son œuvre Phœnix appelait à une renaissance sur fond de mémoire du passé, à destination des générations actuelles et futures. Animée par l’idée que “l’art peut changer le monde”, Hayat Nazer (qui se définit autant comme une artiste qu’une “activiste sociale”) est déterminée à mettre en lumière les maux de son pays et à œuvrer pour un futur meilleur.

© Hayat Nazer

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