Plusieurs statues déboulonnées aux États-Unis et au Mexique

Plusieurs statues déboulonnées aux États-Unis et au Mexique

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© Nathan Howard/Getty Images/AFP

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Par Donnia Ghezlane-Lala

Publié le

Les militants américains et mexicains continuent de lutter contre les statues représentant des figures d'oppression.

Dans la foulée des manifestations provoquées dans tous les États-Unis par la mort de George Floyd, homme noir asphyxié sous le genou d’un policier blanc à Minneapolis fin mai, de nombreuses statues représentant des présidents américains et autres figures historiques associées à l’esclavage avaient été déboulonnées dans le pays. Au Mexique également, la lutte anticolonialiste se prolonge.

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À Portland, les statues de Roosevelt et Lincoln abattues

Le président Donald Trump a appelé lundi 12 octobre à mettre en prison les “animaux” responsables d’avoir déboulonné la veille deux statues d’anciens présidents américains à Portland, ville du nord-ouest des États-Unis secouée par des manifestations quasi quotidiennes depuis fin mai.

“Mettez ces animaux en prison tout de suite. La gauche radicale ne sait rien faire d’autre que de profiter de la ‘gestion politique’ des idiots. C’est ça Biden !”, a écrit Donald Trump sur Twitter, dans une bordée de messages réagissant aux troubles survenus dimanche soir à Portland, dans l’Oregon.

Une manifestante se tient au-dessus de la statue renversée du président Theodore Roosevelt durant le “jour de la rage”, des peuples amérindiens, le 11 octobre 2020, à Portland, aux États-Unis. Les activistes ont déboulonné deux statues des présidents américains avant que la police intervienne. (© Nathan Howard/Getty Images/AFP)

La ville et l’État sont tous deux dirigés par ses adversaires démocrates. Un groupe estimé à environ 300 personnes par la police s’était rassemblé dans le centre de Portland à la veille du “Columbus Day”, censé célébrer la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb. Beaucoup d’États et de villes du pays ont toutefois rebaptisé cette journée “jour des peuples autochtones”, en raison des critiques croissantes estimant que Christophe Colomb a inauguré l’ère de la colonisation et des violences racistes.

Les manifestant·e·s, pour la plupart vêtu·e·s de noir, masqué·e·s et casqué·e·s, ont commencé par mettre à bas une statue du président Theodore Roosevelt (1858-1919) à l’aide d’un véhicule, avant de déboulonner celle du président Abraham Lincoln (1809-1865). Les deux statues ont été recouvertes de peinture et la société historique de Portland, située à proximité, a également été vandalisée.

“Ce groupe avait l’intention de commettre des actes criminels violents et de semer le désordre”, a déclaré lundi le chef de la police de Portland, Chuck Lovell, selon lequel trois personnes ont été arrêtées. Le rassemblement, où se trouvaient des “individus armés”, avait été présenté par les organisateur·rice·s comme “une journée de rage”, a-t-il ajouté. Le maire de Portland, Ted Wheeler, a quant à lui qualifié ces actes de vandalisme “d’obscènes”, considérant qu’ils allaient “à l’encontre des valeurs de cette ville”.

Une statue de Christophe Colomb également retirée à Mexico

Vue du piédestal vide après que la statue de Christophe Colomb a été retirée, dans l’avenue Reforma, à Mexico, le 11 octobre 2020. Les autorités mexicaines ont retiré dès le samedi la statue qui trônait dans la capitale, deux jours avant la date qu’avaient planifié des militant·e·s pour la déboulonner, durant l’événement commémorant l’arrivée du navigateur italien en Amérique. (© Alfredo Estrella/AFP)

Une statue de l’explorateur Christophe Colomb a été retirée samedi 10 octobre d’une grande avenue de Mexico par les autorités, alors que des militant·e·s avaient annoncé leur intention de la démonter lors d’une manifestation prévue lundi 12 octobre, à l’occasion de la commémoration de l’arrivée de Colomb en Amérique.

La statue du navigateur génois a été démontée et retirée d’une grande artère touristique de la capitale mexicaine, en lien avec les institutions culturelles, a annoncé dans un communiqué le ministère de la Culture. Ce retrait répond “à la demande du gouvernement de la ville de Mexico” de soumettre le monument “à un examen et à une éventuelle restauration” qui sera menée par l’Institut national d’anthropologie et d’histoire (INAH).

Plusieurs groupes militants avaient appelé à une manifestation sous le mot d’ordre “Nous la ferons tomber”, lundi 12 octobre, jour de la commémoration de l’arrivée de Christophe Colomb en Amérique en 1492. Longtemps présenté comme “le découvreur de l’Amérique”, Christophe Colomb est désormais associé par certain·e·s aux exactions commises par les Européen·ne·s envers les Amérindien·ne·s.

Des travailleur·se·s municipaux·les nettoient la statue de Christophe Colomb, protégée par une barrière en métal après que les activistes ont menacé de la déboulonner lors du “Day of the Race”, sur les réseaux sociaux, à Mexico, le 12 octobre 2020. (© Pedro Pardo/AFP)

Quatre statues de frères franciscains, dont l’Espagnol Bartolomé de las Casas, ont également été déplacées en vue d’une restauration. La maire de Mexico, Claudia Sheinbaum, a laissé entendre, lors d’une conférence de presse, qu’une fois restauré, le monument pourrait ne pas être remonté sur l’avenue, où il avait été installé en 1877. “Cela vaudrait peut-être la peine […] de réfléchir collectivement à ce que Colomb représente, en particulier pour l’année prochaine”, a-t-elle dit.

En 2021, le Mexique commémore le 200e anniversaire de son indépendance et le 500e anniversaire de l’invasion européenne avec la chute de Tenochtitlan (ancien nom de Mexico sous domination aztèque). Le président du Mexique, Andrés Manuel Lopez Obrador, a réclamé dans une lettre datée du 2 octobre que le Vatican, mais également la Couronne et le gouvernement espagnols présentent des excuses aux peuples indigènes pour les “atrocités les plus honteuses” commises lors de la conquête espagnole en 1521.

Des changements au Venezuela, en Colombie, au Chili et en Bolivie

Du côté du Venezuela, le président Nicolas Maduro a récemment déclaré initier “un processus de décolonisation” en remplaçant lundi le nom de l’autoroute principale de Caracas, celui d’un “colonisateur génocidaire”, par le nom d’un célèbre chef indigène.

Un manifestant devant un panneau publicitaire durant les échauffourées entre les militant·e·s et la police, lors du “Day of the Race”, à Santiago, au Chili, le 12 octobre 2020. (© Martin Bernetti/AFP)

Le chef d’État a fait cette annonce lors de la célébration du 528e anniversaire de la Résistance indigène. C’est ainsi que le mouvement chaviste, créé par le président Hugo Chavez (1999-2013), appelle le jour de la découverte des Amériques par Christophe Colomb, le 12 octobre 1492.

Ailleurs en Amérique latine : des milliers de membres des communautés indigènes de Colombie, du Chili et de Bolivie ont manifesté lundi, jour de commémoration de l’arrivée de Christophe Colomb sur le continent américain et de la fête nationale en Espagne.

Des personnes de la communauté Mapuche dansent et jouent de la musique durant une manifestation ayant lieu à Santiago, au Chili, lors du “Day of the Race”, le 12 octobre 2020. (© Martin Bernetti/AFP)

Dans le sud-ouest de la Colombie, les manifestant·e·s ont convergé vers Cali pour “dénoncer les massacres systématiques qui se produisent sur [leur] territoires sans que le gouvernement ne s’y intéresse”, a déclaré Franky Reinosa, du Conseil régional indigène de l’État de Caldas (ouest).

Les manifestant·e·s demandent également à être consulté·e·s sur les grands projets qui concernent leur territoire, et la pleine mise en œuvre du plan de paix historique de 2016 qui a mis fin à un demi-siècle de violences avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

Vue de la statue d’Isabella I, reine de Castille, portant une tenue traditionnelle amérindienne, mise par les activistes, durant le “Colombus Day”, à La Paz, Bolivie, le 12 octobre 2020. (© Luis Gandarillas/AFP)

Des militant·e·s des Premières nations colombiennes manifestent lors du “minga”, à Cali, en espérant rencontrer le président Duque après l’avoir interpellé à travers une lettre ouverte quelques jours plus tôt, en Colombie, le 12 octobre 2020. Les activistes ont exprimé leur peur face à la montée de la violence causée par la présence de groupes armés sur leurs territoires, ainsi qu’aux récents massacres et meurtres de plusieurs personnes au sein de leur communauté. (© Luis Robayo/AFP)

Des militant·e·s des Premières nations colombiennes manifestent lors du “minga”, à Cali, en espérant rencontrer le président Duque après l’avoir interpellé à travers une lettre ouverte quelques jours plus tôt, en Colombie, le 12 octobre 2020. Les activistes ont exprimé leur peur face à la montée de la violence causée par la présence de groupes armés sur leur territoire, ainsi qu’aux récents massacres et meurtres de personnes au sein de leur communauté. (© Luis Robayo/AFP)

Avec AFP.