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Dans les années 90, Hugh Steers peignait les malades et l’épidémie du sida

Dans les années 90, Hugh Steers peignait les malades et l’épidémie du sida

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© Estate de Hugh Steers/Alexander Gray Associates, New York

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Par Lise Lanot

Publié le

Les œuvres du peintre offrent une incursion poignante dans l’intimité des malades, tout en dénonçant l’inaction politique.

En 1987, Hugh Steers contractait le VIH. Huit ans plus tard, à seulement 32 ans, il décédait suite à des complications causées par le virus. Plus de 25 ans après la mort de l’artiste, son œuvre, toujours aussi moderne, percutante et pertinente, continue d’être présentée au public, à l’exemple d’une récente exposition new-yorkaise.

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Exposées à la galerie parisienne David Zwirner, ses toiles racontent le tournant des années 1980 aux années 1990, les tristement célèbres “années sida” chargées de cadavres et d’inactions politiques. Hugh Steers ancrait son travail dans l’intimité, au sens propre comme figuré, de ses personnages. Représentés dans leur chambre ou leur salle de bains, les corps des malades peints sont lourds d’une charge collective. Chaque peinture présente une intimité particulière, miroitement d’une souffrance partagée.

Hugh Steers, “Hospital Bed”, 1993. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Une “morosité magnifique”

En septembre 1992, trois ans avant de mourir, Hugh Steers revendiquait faire partie “de la tradition d’un certain genre d’artistes américains” : “Des artistes qui incarnent une certaine morosité magnifique. Edward Hopper, Jackson Pollock, Franz Kline : ils avaient tous cette même beauté austère. Ils trouvaient de la beauté dans les formes les plus brutales.” Les scènes figuratives de Hugh Steers, ses aplats de couleurs atones, reflètent cette quête de la beauté dans la douleur, de l’intimité dans la souffrance, de l’amour dans l’angoisse.

Son désir de montrer l’intime se doublait d’une volonté d’insuffler à son travail des élans politiques, au travers d’objets (drapeaux états-uniens, téléviseur, mégaphone) ou de scènes de vie. Dans Official Letter par exemple, une jeune femme se couvre la tête après avoir reçu, semble-t-il, ses résultats d’analyse. Symbole d’asphyxie et de condamnation à mort ou d’aveuglement volontaire des pouvoirs publics, les interprétations sont multiples.

Hugh Steers, “Official Letter”, 1990. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Réalisées en réaction à l’épidémie du sida de la fin du XXe siècle, les œuvres de Hugh Steers sont intemporelles. En témoigne la volonté de la galerie Alexander Gray de récemment proposer une rétrospective de son travail en affirmant que “l’imagerie de l’artiste […] anticipait l’isolement, la perte et l’incertitude” liés à la situation sanitaire actuelle.

Hugh Steers, “Bandages”, 1992. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Two Men and a Woman”, 1992. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Clean Up”, 1987. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Crow”, 1988. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Crows”, 1988. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Flag, Megaphone”, 1992. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Gas Mask”, 1992. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Girl in Blue and Red”, 1987. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Gold Box”, 1988. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Sleeping Cat”, 1988. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

Hugh Steers, “Straps”, 1993. “Strange State of Being”, 2021. (© Alexander Gray Associates, New York/Estate de Hugh <span class="il">Steers</span>)

L’exposition dédiée au travail de Hugh Steers “Strange State of Being” était visible à la galerie Alexander Gray de New York jusqu’au 3 avril 2021.

Une exposition sur Hugh Steers est à voir à la galerie David Zwirner (Paris) jusqu’au 29 janvier 2022.