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De Bonnard à Salgado, une expo invite le public à trouver son arbre

De Bonnard à Salgado, une expo invite le public à trouver son arbre

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© Robert Longo/Galerie Thaddeus Ropac, Londres et Paris

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Par Donnia Ghezlane-Lala

Publié le

D’un grand chêne incarnant Georges Clemenceau aux couleurs vives d’un amandier en fleurs de Bonnard, une expo invite chacun à choisir son arbre à travers la peinture et la photo.

Ce sont “des arbres très différents, torturés pour certains, sublimes pour d’autres. N’importe qui pourra y trouver un arbre qui lui rappelle son histoire personnelle”, s’enthousiasme Laurent Tillon, responsable de la biodiversité de l’Office national des forêts et membre du comité scientifique de “Vous êtes un arbre !”, une exposition proposée jusqu’au 5 juin 2022 à Deauville.

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Pour l’auteur du livre Être un chêne (aux éditions Actes Sud), face à un arbre, à son “rythme complètement différent des nôtres”, à sa “force et sa longévité assez incroyables”, “on peut se questionner sur ce qui est vraiment important dans nos vies”.

L’arbre peut être spectaculaire, comme L’Ancêtre, un chêne majestueux peint par l’impressionniste Gilbert Bellan, sur commande de Georges Clemenceau. Ce dernier estimait “qu’aucun portrait de lui n’était plus ressemblant”, assure à l’AFP Thierry Grillet, commissaire de l’exposition et ancien directeur des affaires culturelles à la BnF.

En fond sonore, une voix scande discrètement sur un rythme électro-pop “Vous êtes un arbre”, “Retenez l’odeur des fleurs”, “Vous êtes calme et fort”, “Vous sentez la sève qui monte en vous, vous ne pensez plus”. Le titre de l’exposition en forme de mantra hypnotique vient à la fois de ce morceau signé par le duo SDA en 1992 et des Paradis artificiels de Charles Baudelaire. De L’Amandier en fleurs aux couleurs vives de Pierre Bonnard émane même l’espoir d’une “résurrection”, commente M. Grillet. L’artiste a peint ce tableau sur son lit de mort en 1947.

Ronsard illustré par Matisse

Le photographe contemporain sud-coréen Bae Bien-U expose ses pins “saisis à l’aurore”. L’artiste Eva Jospin propose une forêt monumentale et “féerique”, en carton. À l’opposé, le botaniste du XVIe siècle Claude Duret présente dans un tout petit ouvrage “extrêmement rare” son “encyclopédie” recensant des arbres “merveilleux”, parfois “tristes” ou “timides qui se rétractent quand on les approche”, poursuit M. Grillet.

L’arbre se montre à la fois “fragile et fort” chez le photographe new-yorkais Robert Longo, il “gesticule et pleure” lorsque Gustave Doré illustre L’Enfer de Dante. Man Ray a quant à lui redressé un arbre mort pour en faire le “portrait d’un homme-tronc fortement sexué” dans un environnement lunaire, relève M. Grillet, tandis que Matisse illustre Ronsard avec un arbre aux courbes très sensuelles.

Plus politique, le photographe Julien Berthier colle avec une pointe d’humour une hache au sommet d’un arbre mort “montrant que la déforestation excessive des forêts primaires, c’est un peu nous suicider”, selon M. Grillet. Les Scieurs de bois de Jean-François Millet lui font écho un peu plus loin.

À l’initiative de Théodore Rousseau, également exposé, une pétition avait appelé à protéger la forêt de Fontainebleau de l’avidité de la révolution industrielle. George Sand fut l’une des signataires, raconte le commissaire. Le combat continue. Le peintre Fabrice Hybert et le photographe Sebastião Salgado, également exposés à Deauville, ont planté des centaines de milliers d’arbres ces dernières décennies, en Vendée pour l’un, au Brésil pour l’autre.

Konbini arts avec AFP