L’amitié improbable entre une peintre et le voleur de ses œuvres documentée dans un film

L’amitié improbable entre une peintre et le voleur de ses œuvres documentée dans un film

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Par Lise Lanot

Publié le

"The Painter and the Thief" retrace avec sensibilité la rencontre entre deux âmes en peine que tout aurait pu séparer.

De prime abord, l’histoire paraît sensationnelle. Il y est question d’un héroïnomane prêt à commettre des délits pour assouvir ses pulsions, d’une artiste peintre qui se fait voler deux de ses œuvres les plus prisées et d’une amitié improbable entre le voleur et sa victime. Le réalisateur Benjamin Ree est pourtant parvenu à faire de cette histoire un documentaire touchant, loin des clichés et du mélodrame.

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Pendant trois ans, il a documenté le dépliage d’une relation devenue fusionnelle entre le Norvégien Karl-Bertil Nordland et l’artiste tchèque Barbora Kysilkova. Tout avait mal commencé entre les deux, le premier avait dérobé, en plein jour, deux des œuvres les plus populaires (et donc potentiellement les plus chères) de la première. En lisant cette affaire dans les journaux, Benjamin Ree s’était imaginé réaliser un court-métrage documentaire d’une dizaine de minutes sur l’affaire. Après plus de 100 rencontres avec le duo et des heures de tournage, The Painter and the Thief dure 1 heure 40.

Une amitié impossible

La première rencontre entre la victime et l’accusé a eu lieu au tribunal. Face à son voleur, la peintre a oublié sa colère et a demandé à Karl-Bertil si elle pouvait réaliser son portrait – afin de se réapproprier cette histoire qu’elle n’a pas choisie, a-t-elle confié à Vanity Fair : “Mon objectif n’était pas du tout de devenir son amie. Mais quand je suis entrée dans le tribunal et que j’ai vu Karl-Bertil, […] la personne que j’ai vue n’était pas un criminel. J’ai vu quelqu’un de très vulnérable, de détruit, assis là.”

Le film retrace la quête de la peintre à la recherche de ses deux tableaux volés et surtout, la rencontre entre ces deux personnes qui finissent par se découvrir beaucoup de points communs et lutter ensemble contre leurs noirceurs individuelles. “Elle est mon âme sœur en quelque sorte, de façon très sombre. On partage certains des mêmes démons”, confie l’homme. À leur rencontre, la peintre tente de se sortir d’une relation abusive et de s’émanciper grâce à son art, tandis que Karl-Bertil combat son addiction à l’héroïne.

“The Painter and the Thief”, 2020. (© Neon)

Une façon de se racheter

Les deux protagonistes se montrent très vulnérables, notamment lorsque Karl-Bertil fond en larmes en découvrant son portrait, réalisé grâce à de longues séances de pose durant lesquelles ils s’observaient l’un l’autre : “Elle me voit très bien, mais elle oublie que je la vois aussi”, déclare l’homme.

Se montrer si fragile a été particulièrement difficile pour lui. Il raconte avoir accepté de participer au tournage pour Barbora, parce qu’il “lui devait bien ça”, sachant qu’il n’a aucune idée de ce que sont devenues les toiles volées (qu’il a vendues pour de la drogue), et afin de “montrer son talent” au monde. L’objectif est atteint, puisque le film, disponible sur Hulu, a conquis le public du prestigieux festival du film de Sundance, qui l’a récompensé du premier prix de sa compétition consacrée aux documentaires internationaux.

“The Painter and the Thief”, 2020. (© Neon)

“The Painter and the Thief”, 2020. (© Neon)

“The Painter and the Thief”, 2020. (© Neon)

“The Painter and the Thief”, 2020. (© Neon)