5 photographes de “l’avant-garde noire” à découvrir absolument

5 photographes de “l’avant-garde noire” à découvrir absolument

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© Quil Lemons ; © Nadine Ijewere

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Par Lise Lanot

Publié le

Embarquez à la découverte des sublimes univers visuels de Nadine Ijewere, Quil Lemons, Renell Medrano, Stephen Tayo et Ruth Ossai.

Dana Scruggs, Tyler Mitchell, Micaiah Carter, Campbell Addy ou encore Arielle Bobb-Lewis. Voilà des noms que vous avez pu lire au gré de nos articles ces dernières années, et il semble qu’on ne se soit pas trompées en les mettant en avant, puisque la 52e exposition des Rencontres d’Arles leur consacre également une exposition d’envergure : “The New Black Vanguard”. Conçue à New York par l’auteur et curateur Antwaun Sargent, l’exposition (co-produite par Aperture et transformée sous forme livresque) a rejoint, pour l’été, le sud de la France en grandes pompes.

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Les œuvres de quinze jeunes photographes noir·e·s (la plupart sont né·e·s dans les années 1990) originaires d’Afrique, d’Amérique et d’Europe sont présentées sous les voûtes de l’église Sainte-Anne, aux côtés d’une sélection d’une cinquantaine d’images supplémentaires signées d’artistes du monde entier (à l’instar de Kenny Germé, Delphine Diallo, Kennedi Carter ou Joshua Woods). Pour celles et ceux qui ne pourront pas visiter l’exposition, nous avons distingué les travaux de cinq photographes à découvrir absolument.

Nadine Ijewere, née en 1992 à Londres

Sans titre, 2018. (© Nadine Ijewere)

Si le nom de Nadine Ijewere est devenue internationalement célèbre à ses 26 ans, lorsqu’elle est devenue la première femme noire à photographier une couverture de Vogue (toutes éditions confondues) en 125 ans d’existence, elle n’a jamais cherché la reconnaissance à tout prix.

Au contraire, celle qui est passée par des études de mathématiques et de sciences, puis par une expérience dans une entreprise de design d’intérieur, a préféré conserver sa passion pour la photo en tant que hobby plutôt que de devoir “changer [son] style pour [s]‘adapter à la norme”.

“Je n’avais aucune envie de produire des travaux qui me feraient décrocher des jobs dans l’industrie de la mode s’ils ne me parlaient pas. Tant d’images que je voyais célébraient toujours le même style.

Lors de ma dernière année [à la London College of Fashion, ndlr], j’ai commencé à caster des filles métisses qui ne se trouvaient pas dans la norme de l’industrie, et c’est devenu quelque chose de central dans mon travail […]. J’étais déterminée à protéger ma vision et je voulais être sûre de créer ce que j’avais en tête. Sinon, à quoi bon être artiste ?”, s’interrogeait-elle auprès de Vogue en 2018.

Le succès arrivant, la photographe d’origine jamaïcaine et nigériane n’a jamais failli à ses convictions, utilisant son travail pour “célébrer toutes les formes de beauté”, permettre à tou·te·s de s’identifier dans les pages des magazines et “inclure bien plus de diversité devant et derrière l’appareil photo”.

Quil Lemons, né en 1997 à Philadelphie

New York, 2017. (© Quil Lemons)

À 23 ans, Quil Lemons a pu s’enorgueillir (grâce à sa une montrant Billie Eilish) de devenir le plus jeune photographe à shooter une couverture de Vanity Fair :

“Cette couverture représente tellement pour moi. Du sang, de la sueur et des larmes ! C’est la preuve que, partout, de jeunes gamins noirs peuvent faire ce qu’ils veulent, envers et contre tous.

Merci à toutes celles et ceux qui ont parié sur ce petit du sud de Philadelphie. Merci aux femmes et hommes noirs du sud de Philadelphie qui m’ont élevé pour que je devienne celui que je suis aujourd’hui. Merci à toutes celles et ceux qui m’ont inspiré et qui m’ont soutenu depuis le début”, écrivait-il alors en mars 2021 sur Instagram.

Son CV ne s’arrête pas à Vanity Fair, le jeune homme a déjà travaillé pour i-D, Variety, Teen Vogue, Fader ou encore Allure. En plus de servir d’inspiration “aux jeunes artistes noir·e·s”, Quil Lemons espère développer avec sa photographie un “langage visuel particulier qui interroge les idées autour de la masculinité, de la famille, du fait d’être queer, des origines ethniques et de la beauté”, confiait-il au journal local Philly Voice.

Renell Medrano, née en 1992 à New York

Slick Woods, Brooklyn, 2018. (© Renell Medrano)

Renell Medrano a beau circuler dans les sphères de célébrités que le monde occidental s’arrache (ASAP Ferg ou les sœurs Jenner), la photographe souhaite avant toute chose mettre en lumière son passé, son histoire et les obstacles qu’elle a surmontés :

“[Mon travail] est unique parce que c’est un reflet de ce que je ressens. Avoir grandi dans le Bronx joue un grand rôle là-dedans aussi. Tout n’était pas rose, mais j’ai trouvé de la beauté dans les difficultés et la débrouille du quotidien”, affirmait-elle à “Dazed” l’année dernière.

Photographe et réalisatrice, elle tourne son objectif autant vers ses origines dominicaines que des stars ou des visages qui la marquent et racontent, selon elle, des histoires.

Stephen Tayo, né en 1994 à Lagos

Pedro Street, Lagos, Nigeria, 2019. (© Stephen Tayo)

Pour Stephen Tayo, tout a commencé dans son Lagos natal où il photographiait les rues et leurs passant·e·s. Le photographe continue de mettre à l’honneur son pays d’origine et ses cultures – traditionnelles, modernes et urbaines – dans des clichés aux couleurs vibrantes et contrastées.

Photographe de mode et documentaire, il déclare sans ambages que “Lagos est un défilé” et que “la haute couture et le street style sont la même chose”, et ses images en sont la preuve. Les poses de ses modèles rappellent les travaux d’artistes de l’ouest africain des années 1950 et 1960, tels que Seydou Keita et Malick Sidibé.

Ruth Ossai, née en 1991 au Nigeria

Londres, 2017. (© Ruth Ossai)

Le travail de Ruth Ossai s’inspire quant à lui grandement des films de Nollywood qu’elle regardait enfant. Pour ses photos posées, l’artiste tient à “laisser un contrôle total à [ses] modèles dans la façon dont elles se représentent” afin de montrer la réalité puisque, selon ses propres termes : “La photo de mode n’a pas à être inaccessible, intouchable ou inatteignable.”

Ses modèles ont d’ailleurs longtemps été des membres de sa famille ou des ami·e·s, pour ne pas “perpétuer une culture élitiste dans l’imagerie de mode”. Un choix viscéral qui a porté ses fruits, malgré ses premiers doutes : “Je prenais des photos de ma grand-mère en me disant que ça n’allait nulle part. Mais finalement, parfois, ce qui est intime et personnel peut vraiment toucher les gens”, confiait-elle à l’Evening Standard.

Londres, 2017. (© Ruth Ossai)

Les Rencontres photographiques d’Arles ont lieu jusqu’au 26 septembre 2021.

Konbini arts, partenaire des Rencontres photographiques d’Arles 2021.