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Des portraits en gros plan racontent une société de contrastes

Des portraits en gros plan racontent une société de contrastes

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© Paul Trevor

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Par Lise Lanot

Publié le

Entre vies publique et intime, Paul Trevor a glissé son appareil photo au plus proche d’inconnus.

Les pores sont visibles, les rides apparentes. Des mèches de cheveux s’échappent, les regards se perdent ou rencontrent, étonnés, un objectif – celui de l’appareil de Paul Trevor. Entre 1977 et 1992, le photographe britannique baladait son 35 millimètres et son objectif 50 millimètres entre la Cité de Londres et, à un peu plus de deux kilomètres de là, le marché de Brick Lane, à la recherche de visages à immortaliser.

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Celui qui a travaillé comme comptable avant de se consacrer à sa passion pour la photo cherchait alors à raconter, en images, une période marquée par le ralentissement économique des années 1970 et la montée du thatchérisme conservateur des années 1980.

© Paul Trevor

Mettre en contraste les visages du centre historique et financier de la capitale et ceux de l’est de la ville permettait à Paul Trevor de créer un parallèle avec les politiques libérales et monétaristes voulues par la Première ministre d’alors. Résolument motivé par un “élan social”, tel que le présente In Your Face, l’ouvrage compilant ses portraits, le photographe se livrait à un exercice particulier de photographie de rue, où il tentait de s’approcher au plus près de ses modèles, sans être vu. L’artiste confie, a posteriori :

“Ce travail demandait que je photographie des étrangers en très gros plan sans leur parler. Cela impliquait de travailler très subrepticement. Je trouve que cette approche créait une tension dans les photos, entre une intimité physique et un détachement émotionnel. Les résultats me fascinaient : des images objectives qui étaient en même temps subjectives. C’était une toute nouvelle expérience.”

© Paul Trevor

Un travail tout en contrastes

Ce travail des contrastes – entre les modèles, entre objectivité et subjectivité, entre proximité physique et éloignement émotionnel – est permis grâce à la technique et à la rapidité du geste de Paul Trevor. En préface du livre, le photographe écossais Stephen McLaren souligne l’innovation dont a fait preuve son collègue en créant des images prises en lumière naturelle, “dont la profondeur et la perspective correspondent à l’optique de l’œil humain”. Bien que capturant des portraits d’étranger·ère·s, le Britannique a créé un “sentiment d’espace intime”.

L’apparence presque grotesque des images (qui rappellent le travail de Martin Parr, par ailleurs sensible au travail de Paul Trevor, en témoigne une exposition organisée dans sa fondation en 2018) ne les dépouille en aucun cas de leur sensibilité. Immortalisés en noir et blanc il y a une quarantaine d’années, à quelques centaines de kilomètres de la France, ces visages continuent de porter une charge intime et sensible.

© Paul Trevor

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Couverture de “In Your Face” de Paul Trevor, publié chez Hoxton Mini Press.

Le livre de Paul Trevor In Your Face est publié aux éditions Hoxton Mini Press.