Four Chambers repense le porno traditionnel à travers ses photos

Four Chambers repense le porno traditionnel à travers ses photos

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Par Lise Lanot

Publié le

Four Chambers propose un cinéma qui mêle art et porn, et s’inscrit ainsi dans une volonté de modernisation de l’industrie du porno, en faisant fi de certaines de ses conventions.

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La créatrice de Four Chambers définit son initiative comme un “projet moitié artistique, moitié cinémascope érotique”. Plus précisément, c’est une société de production créée en partie par Vex Ashley, ancienne étudiante dans une école d’art, qui possède de l’expérience dans “la photo argentique et le sexe numérique en ligne”, précise-t-elle avec humour.

Spécialisé dans la vidéo pornographique, Four Chambers suit un certain tournant de cette industrie qui tend à se moderniser et à ouvrir ses horizons en se détachant d’une hiérarchisation inamovible et de scénarios pensés pour une partie seulement de la population. Jugeant le business du porno quasi archaïque, Vex Ashley, à qui nous avons posé quelques questions, prône un porno “indépendant, autofinancé, excitant, créatif, éthique et collaboratif.”

Le porno comme medium créatif

La cinéaste, s’étant spécialisée dans la photo argentique, porte évidemment une attention toute particulière à la dimension artistique de ses images, à la lumière et à la composition, tout en présentant des corps divers, embellis par sa caméra. À l’image de ses films, ses photographies dégagent une atmosphère aérienne et poétique qui n’évince pas pour autant le cru inhérent à l’érotisation des rapports sexuels. D’ailleurs, elle est loin de dissocier sa pratique artistique de son travail filmique, commencé en 2013 :

“Je finissais mon école d’art et je voulais voir si je pouvais mettre la même réflexion pour les concepts et l’esthétique dans la pornographie que dans mon travail artistique. Je ne voyais alors pas vraiment le potentiel du porno comme medium créatif me permettant d’explorer mes idées !”

Dans la même veine que l’initiative de la Suédoise Erika Lust, quoique beaucoup plus amateur et “do it yourself”, souligne-t-elle, Vex Ashley est mue par une volonté éthique. Loin d’être un business, le projet est collaboratif et a trouvé ses soutiens grâce au financement participatif : “Nous voulons simplement explorer le potentiel de ce que le porno peut dire et faire.”

Si son porno se veut ouvert à tous, c’est aussi parce qu’il s’inspire de toute chose. La jeune femme, fascinée par la façon dont “le sexe est connecté à la transcendance”, collecte sans cesse des références mystiques à intégrer dans ses films :

“On explore beaucoup de références religieuses et mythologiques. Comme une sorte de peinture Memento Mori, on aime utiliser le symbolisme. Mes écrivains et créateurs préférés sont des gens comme Emily Dickinson, Jorge Luis Borges, Nick Cave ou Louise Bourgeois, j’espère qu’on se situe quelque part au milieu de tous ces artistes.”

Des images en accord avec la ligne de pensée des créateurs

Les photographies issues des films et des tournages de Four Chambers représentent bien la vision de ses créateurs (Vex Ashley et un collaborateur qui reste anonyme) qui affirment ne pas être intéressés par l’explicite immédiat et intense du porno dit classique : “Il nous semble intéressant de construire une atmosphère, d’impliquer l’imagination du spectateur. Nous mettons en lumière des choses qui sont habituellement mises de côté, à l’instar de la respiration, du toucher ou du contact visuel.”

Tout comme ses films, les images de Vex Ashley respectent ses envies de contraste entre lumière naturelle douce et lumière crue des néons de boîtes de nuit. Avec beaucoup de simplicité, elle indique vouloir créer quelque chose de beau, conceptuellement intéressant et qui est “putain d’amusant” à tourner avec des gens inspirants. Refusant toute étiquette, Four Chambers se joue du double prisme de l’art dans le porno et du porno dans l’art.