AccueilPop culture

Les dernières couvertures du Time ont été shootées à l’iPhone

Les dernières couvertures du Time ont été shootées à l’iPhone

avatar

Par Donnia Ghezlane-Lala

Publié le

Pour le dossier “Firsts” du Time, dressant le portrait des femmes qui changent le monde aujourd’hui, la photographe brésilienne Luisa Dörr a réalisé les photos des différentes couvertures du dernier numéro à l’iPhone.

À voir aussi sur Konbini

Serena Williams, Ellen DeGeneres, Hillary Clinton, Oprah Winfrey, Selena Gomez, Ava DuVernay et Aretha Franklin : elles font toutes partie du dossier “Firsts” du Time, dédié à des femmes influentes de tous horizons qui changent le monde d’aujourd’hui. Elles ont toutes été pionnières et ont révolutionné leur domaine.

Pour shooter les couvertures du magazine, la directrice de la photographie Kira Pollack a demandé à Luisa Dörr, une photographe âgée de 28 ans, de tirer le portrait des 46 femmes qui font l’objet d’un focus au sein du dossier. La particularité ? Elle l’a fait avec un iPhone. Il n’y a pas que les 12 couvertures du magazine qui ont été shootées à l’iPhone, mais aussi tous les portraits qui accompagnent chaque article consacré à une de ces femmes.

“Il n’y a pas de bruit, pas de gadgets, d’outils. Il n’y a que le sujet et moi-même”

La photographe a commencé à shooter avec son iPhone 5, puis elle a eu recours à un iPhone 6, 6S Plus et 7. Elle utilisait systématiquement le mode carré, et parfois l’option HDR pour avoir plus de détails sur les visages. À propos de sa collaboration, Kira Pollack, qui a repéré Luisa Dörr sur Instagram, écrit :

“Le talent fait souvent surface quand on s’y attend le moins. L’été dernier, je suis tombée sur le travail d’une jeune photographe brésilienne sur Instagram, dont je n’avais jamais entendu parler. Ce sont ses images qui ont capté mon attention, pas son nom. […]

À mesure que je faisais défiler ses images sur son profil, je les trouvais toutes belles : il y avait un nombre infini de portraits de femmes de tous âges, pris au milieu de magnifiques paysages. Lumière naturelle, belles couleurs, des compositions très étudiées. Dans sa biographie, on pouvait lire : ‘Toutes les photos sont faites à l’iPhone.’ Et je l’ai tout de suite contactée. […]

Son travail correspondait totalement à la vision du dossier ‘Firsts’ sur lequel nous commencions à travailler à cette époque. Je le savais rien qu’en voyant son feed et son intérêt pour les femmes en tant que sujets. Ce que je ne savais pas, c’était à quel point elle maniait son iPhone à la perfection et avec rapidité : parfois, elle n’avait besoin que de cinq minutes pour tirer le portrait d’une femme influente pour nos couvertures.

En septembre dernier, Luisa est arrivée à New York avec rien d’autre qu’une valise et son petit iPhone. […] La plupart des femmes qu’elle a photographiées pour nous […] ont été shootées par les plus grands photographes du monde. Et la plupart de ces shootings étaient bondés d’assistants, de techniciens lumière, et d’une équipe entière de petites mains.”

Elle conclut en disant que le smartphone est devenu si omniprésent dans notre culture, si essentiel dans la façon dont nous communiquons, que ces femmes ont été surprises, au début, par l’utilisation de quelque chose d’aussi basique et évident pour réaliser un portrait qui sera diffusé dans un média aussi prestigieux que le Time.

En revanche, le Time n’est pas le premier magazine à avoir intégré le mobile dans son histoire : une couverture du Elle Australia a été shootée à l’iPhone cette année ; idem du côté de Sports Illustrated ; et le flash d’un iPhone a été utilisé pour une couverture du National Geographic.

Bien sûr, l’outil n’est pas ce qui compte. C’est le regard que Luisa Dörr pose sur toutes ces femmes qui fait la différence. Kira Pollack ajoute que cela permet au shooting de se dérouler “dans le vif de l’action, avec une gestuelle, un regard et un langage du corps plus subtils, qui révèlent bien plus sur une personne”.

“Avant, je ne prenais mon appareil que quand c’était nécessaire, maintenant j’en ai toujours un dans ma poche”

De son côté, Luisa, qui a voyagé pendant trois semaines à travers les États-Unis pour le projet, ne retient que du positif de cette collaboration. Dans une interview, elle raconte qu’en 2012, elle a acheté son premier iPhone et qu’à l’époque, il n’était qu’un complément de son appareil photo professionnel.

Aujourd’hui, c’est l’inverse : “Avant, je ne prenais mon appareil que quand c’était nécessaire, maintenant j’en ai toujours un dans ma poche.” Elle pouvait enfin prendre des photos tout le temps, partout, sans le stress d’avoir du matériel coûteux sur elle. Elle parle également des dessous des shootings :

“Je suis difficilement inspirée par un portrait de quelqu’un qui me semble inaccessible. Pour ‘Firsts’, les photos ont été faites avec une lumière naturelle, j’ai utilisé un réflecteur seulement quand c’était nécessaire. J’aime la simplicité de ces images. Mais la partie que je préfère, en tant que photographe, c’est de me sentir légère et libre. Je n’ai besoin que de mes mains : il n’y a pas de bruit, pas de gadgets, d’outils ou de choses supplémentaires. Il n’y a que le sujet et moi-même. […] Cela semble aussi moins intrusif pour le modèle. C’est très pratique.

Photographier des gens dans la rue ou mes amis avec mon iPhone, c’est une chose. Photographier des femmes célèbres et puissantes en est une autre. Au début, c’était difficile. Elles étaient surprises de me voir débarquer, elles s’attendaient à voir quelqu’un de plus vieux, accompagné d’assistants et avec plus de matériel. […]

Nous n’avions pas beaucoup de temps avec les sujets, donc je devais prendre rapidement les photos. Le shooting le plus court a été de deux minutes, et le plus long, de vingt minutes. En moyenne, on passait entre cinq et dix minutes sur un portrait.”

Dans son approche, elle explique qu’elle voulait imaginer ces portraits comme des peintures : “Je suis fascinée par les paysages et la topographie, les visages des femmes, leurs histoires et leur milieu. Je m’intéresse à la manière dont le temps s’inscrit sur leur visage, pas seulement à travers des marques physiques mais aussi des traces spirituelles.”

Elle avoue avoir été intimidée par Aretha Franklin (ci-dessus), qui fait l’objet d’un édito, car elle a été la première femme à accéder au Rock and Roll Hall of Fame : “J’ai grandi en écoutant sa musique, dans mon village au sud du Brésil. J’étais très nerveuse.” Et cela ne se ressent pas du tout.

Vous pouvez suivre le travail de la photographe sur Instagram.