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Non, ce n’est pas une mannequin “grande taille” qui est mise en avant dans le dernier Playboy

Non, ce n’est pas une mannequin “grande taille” qui est mise en avant dans le dernier Playboy

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Par Justina Bakutyte

Publié le

Le magazine fait les gros titres pour avoir publié des photos de Molly Constable, considérée (à tort) comme étant une mannequin “grande taille”.

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Initialement apparus pour nommer de nouvelles tendances sociétales, des termes comme “génération Y”, “durable”, “intersectionnalité” (et bien d’autres) font aujourd’hui le bonheur des professionnels du marketing. Et quand il s’agit d’attirer un plus large public, certains médias ne se privent pas non plus, quitte à employer ces étiquettes à tort et à travers.

C’est le cas de “grande taille”, une dénomination longtemps utilisée avec dédain, auquel le mouvement du “body-positivism” a redonné ses lettres de noblesse. On le retrouve désormais à tout bout de champ, dès qu’il est question de produits qui s’adressent à des femmes qui sont, en théorie, plus rondes que la moyenne.

Or, si on ne peut que se féliciter d’une plus grande représentation de silhouettes différentes dans les médias, l’usage abusif de certains termes comme celui-ci pose problème.

Explications…

Indéniablement, l’arrivée de profils de toutes les tailles, formes, couleurs et de tous les âges dans l’industrie de la mode est un immense progrès. Il ne s’agit pas de remettre en question le fait que cela participe à rendre le monde (enfin) plus tolérant, et à diffuser l’idée que la beauté n’est pas figée dans un carcan étriqué et réducteur. C’est aussi une immense victoire de voir les médias traditionnels traiter des sujets qui auraient été considérés hier comme étant trop “marginaux” pour être intéressants.

Mais il faut reconnaître que la frontière entre un plaidoyer honnête et l’appât du clic devient de plus en plus floue. À force de vouloir se mettre au goût du jour et de paraître progressistes, les médias usent et abusent des termes “body-positivism” et “grande taille”, souvent sans vraiment se demander si cela se justifie. C’est le cas des photos rétro de la mannequin américaine Molly Constable publiées dans le dernier Playboy.

Molly Constable mesure 1,80 m, ce qui veut dire, en se basant sur ses mensurations, qu’elle porte un 42/44. Or selon des statistiques récentes, aux États-Unis, la majorité des femmes portent un 46/48. La mannequin est donc en dessous de la moyenne nationale.

Pourtant, une bonne partie des médias qui évoquent ces photos ont choisi de qualifier Molly Constable de “mannequin grande taille” en titrant par exemple : “Playboy fait apparaître la mannequin grande taille Molly Constable dans un édito osé.

Pourquoi ?

Le terme n’apparaît pourtant nulle part dans Playboy, pas plus que sur la page de présentation de la mannequin sur le site de son agent, ni sur les réseaux sociaux. Molly Constable a d’ailleurs regretté :

“J’aimerais que nous puissions tous et toutes être appelé·e·s des top models, et que l’on passe à d’autres sujets plus importants. La taille n’est pas un problème. Nous faisons tous le même boulot.”

Molly Constable a raison. Même si une prise de conscience collective est nécessaire sur la politique de la mode quand il s’agit des tailles, faire du sensationnalisme autour du body-positivism n’est pas la solution. Le fait que les top models comme elle soient catégorisées par les médias comme étant “grande taille” renforce le sentiment de confusion des femmes. C’est un cercle vicieux.

Aux États-Unis, un 42 n’est pas une grande taille. Il serait également préjudiciable de la qualifier de “normale”, ce qui impliquerait qu’une femme qui aurait d’autres mensurations ne le serait pas. Elle est ce qu’elle est. Une femme jeune, belle et en bonne santé, qui a été choisie pour être photographiée par un grand magazine. A-t-on vraiment besoin d’en dire plus ?

Traduit de l’anglais par Sophie Janinet