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L’univers des paradis fiscaux mis en images par Paolo Wood et Gabriele Galimberti

L’univers des paradis fiscaux mis en images par Paolo Wood et Gabriele Galimberti

Image :

A man floats in the 57th-floor swimming pool of the Marina Bay Sands Hotel, with the skyline of “Central,” the Singapore financial district, behind him. Singapore

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Par Lisa Miquet

Publié le

Souvent sujet d’actualité mais encore largement méconnus, les paradis fiscaux questionnent. Pour nous éclairer sur ce phénomène, le duo est allé enquêter sur place. 

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Par son aspect immersif, une œuvre peut aisément servir à dénoncer, comprendre ou expliquer notre monde. C’est pour cela que l’université Paris 2 Panthéon-Assas a décidé de s’associer aux rencontres d’Arles, pour débattre de grandes questions de société. En faisant cohabiter des spécialistes du monde universitaire, des entreprises mais aussi des figures de la photographie documentaire et artistique, ils tentent d’apporter un éclairage sur certains grands débats contemporains.

À l’heure où de nombreux scandales financiers éclatent, il semblait opportun de s’interroger sur la question des paradis fiscaux. Faisant souvent la une de l’actualité, notamment depuis l’affaire des “Panamas Papers”, tout le monde parle de ces paradis fiscaux, sans vraiment visualiser ces parties du globe. À quoi ressemblent les îles Caïmans, le Panama ou encore Singapour et le quotidien sur ces territoires qui bouleversent l’économie mondiale ? Pour mettre une image sur ces centres financiers offshore qui nous sont finalement très abstraits, Paolo Wood et Gabriele Galimberti se sont rendus sur place pendant plus de deux ans. Ils ont sillonné ces territoires qui incarnent l’évasion fiscale avec une ambition : être capable de mettre en images ce sujet.

Au-delà de la prise de vues, les deux artistes ont dû réaliser un véritable travail d’investigation, comme l’explique Paolo Woods au site Focus Numérique :

“C’est notre savoir-faire et des mois de travail qui ont permis de tisser des relations et d’avoir les bons accès. Il faut bien comprendre que, souvent, ce qui se passe dans les paradis fiscaux n’est pas très moral, mais c’est légal. Si vous prenez les îles Vierges par exemple, 70 % du PIB vient de compagnies offshore. C’est connu et ils ne s’en cachent pas. […] Il faut donc savoir bien présenter le projet et ne pas mentionner les paradis fiscaux, mais plutôt parler d’économie offshore. Et puis, il faut savoir que pour une photo réussie, nous avons essuyé peut-être 30 refus !”

Pour pouvoir intégrer cet univers très secret, ils ont même dû réellement créer une entreprise intitulée The Heavens, dont le siège social se situe dans le même bâtiment que 285 000 autres entreprises dont les géants Apple, Coca-Cola, Google ou encore Walmart. Sur les différentes images, on découvre des eaux cristallines, des villas et piscines à débordement ; ces lieux semblent donc être des sortes de parc d’attractions pour personnes privilégiées.

Loin d’être un phénomène abstrait et lointain, ces paradis fiscaux modifient véritablement l’économie mondiale, permettant à de nombreuses entreprises et individus de ne pas redistribuer les richesses. De l’argent volé à nos pays, qui appauvrit toujours plus les classes populaires. Cette série d’images nous pose donc des questions d’ordre moral et nous interroge sur le fonctionnement de notre économie. Ce projet avait déjà fait l’objet d’une exposition à Arles en 2015, qui avait fait grand bruit. Il est aujourd’hui de retour sur le devant de la scène dans le cadre d’une exposition à l’université Paris 2 Panthéon-Assas, événement accompagné d’un dispositif multimédia et de deux tables rondes. Un sujet primordial, intéressant à étudier à la vieille des élections présidentielles.

L’exposition “Paradis. Rapport annuel”, de Paolo Wood et Gabriele Galimberti, se tient du 23 mars au 21 avril 2017 à l’université Paris 2 Panthéon-Assas.