Robert Capa : son unique interview exhumée

Robert Capa : son unique interview exhumée

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Par Théo Chapuis

Publié le

“Une mort nette et quelque part magnifique”

Le photographe, tout juste revenu d’un reportage en URSS avec l’écrivain John Steinbeck, se confie au micro des deux animateurs, Jinx Falkenburg et son mari Tex McCrary. Au menu de l’entretien : l’accueil critique réservé à son autobiographie, son voyage en URSS, sa transformation de Friedmann en “Bob” Capa, son fameux cliché de la mort d’un soldat républicain lors de la guerre d’Espagne en 1936.
Mais pas seulement : on en apprend plus sur le poker et sur un souvenir, celui de la mort sous ses yeux d’un jeune soldat américain à Leipzig, le 18 avril 1945, tout près de lui, qu’il qualifiera d’une “mort nette et quelque part magnifique”, le dernier mort de “sa” Seconde Guerre mondiale.
L’interview originale, longue de 23 minutes, a été exhumée par l’International Center of Photography de New York. Elle s’écoute intégralement ci-dessous, en anglais :

Le journal Libération, qui diffuse des extraits de l’interview, en a traduit quelques passages.
Mystérieux, Robert Capa se montre peu loquace lorsque les animateurs cherchent à en savoir plus sur lui : “Vous voyez, il y a tellement d’inventions qui m’entourent que je préfère laisser l’impression qu’elles sont toutes vraies”, déclare-t-il.
Alors qu’ils insistent pour en savoir plus sur lui, Capa résume son parcours rapidement : “J’avais un nom un peu différent de celui de Robert Capa. Ça remonte à une époque assez lointaine, à Paris vers 1934 ou 1935, lorsque je me suis dit que mon vrai nom n’était pas génial. Vous voyez, j’étais un jeune homme, aussi déraisonnable que je le suis aujourd’hui mais plus jeune. Je n’arrivais pas à avoir des commandes, alors j’ai en quelque sorte décidé qu’il était temps pour moi de devenir un grand photographe et que, pour cela, il me fallait impérativement un nouveau nom”.

“N’en parlons pas…”

Le photographe passe peu de temps sur son vrai nom, ne le révélant qu’à contrecoeur : “C’est très embarrassant pour moi d’en parler ici. Ça commence par Andre et y’avait Friedmann aussi, mais n’en parlons pas…”
Il aborde alors son changement d’identité : “je cherchais un nouveau nom et je me suis dit que quelque chose comme Robert sonnerait très américain […]. De même, j’ai imaginé que Capa sonnerait américain et serait facile à prononcer.”Robert Capa”, ça sonnait comme un chouette nom. Puis j’ai inventé une histoire, que Robert Capa était un photographe américain venu en Europe […]. C’était une époque où l’actualité était très chargée en France, avec le Front populaire, les grèves, etc. Je me suis juste installé là avec mon petit Leica, j’ai pris des photos et j’ai écrit dessus “Robert Capa”. On les a vendues pour le double du prix habituel.”
Robert Capa disparaissait sept ans plus tard, fauché par une mine antipersonnel à l’âge de 40 ans, pendant la Guerre d’Indochine.

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