Casting, présentations improbables, gain de 2 euros : Selim nous raconte les coulisses de Next Made in France

Casting, présentations improbables, gain de 2 euros : Selim nous raconte les coulisses de Next Made in France

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Capture d’écran Virgin 17

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Par Kévin Pinto

Publié le

"C’est un jeu de séduction, t’es obligé de parler un peu de cul pour coller au thème de l’émission."

Il a remporté notre classement des meilleures présentations de Next grâce à un improbable : “Je rêve d’être le sosie officiel d’Eddy Mitchell.” Aujourd’hui, Selim Niederhoffer est père de famille, copywriter, formateur en copywriting et auteur de livres à succès. Quinze ans après être sorti du bus de Virgin 17, il nous dit tout sur les coulisses de Next.

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Konbini⎮Selim, tout d’abord, félicitations pour ta première place dans notre classement des meilleures présentations de Next !

Selim Niederhoffer⎮Merci ! C’est une grande fierté. Ma mère est très, très fière. Autant te dire que, quand j’ai montré le classement à ma femme, elle m’a dit : “Mais ça ne va jamais te lâcher, ce truc ! Ce n’est pas possible !” On a tourné Next Made in France en 2009. On est en 2024 et on parle encore de cet épisode. C’est très fort !

On va reprendre l’histoire dans l’ordre. Qu’est-ce qui t’a poussé à t’inscrire à l’émission ? Est-ce que tu voulais trouver l’amour, peut-être ?

J’entends trop de blagues dans ta voix quand tu dis “trouver l’amour”. J’étais un grand romantique, j’avais 25 ans, on était en 2009… Non, ça tient plus à ma situation professionnelle. Je suis sorti d’une école de commerce. J’avais fait un prêt de 25 000 euros, je m’étais endetté. Et à ce moment précis, je suis consultant dans l’industrie automobile. Mais on n’avait plus trop de missions, on était juste après la crise des subprimes et plein de gens se faisaient sortir. Moi, j’étais au bureau, je me tournais les pouces. Je commence à devenir blogueur, à écrire au quotidien. Je me rends compte qu’il y a un marché du blogging, à Paris. Et, à cette même époque, je découvre le livre de Neil Strauss, The Game. En gros, c’est la bible de la drague.

Et, par le plus grand des hasards, je rencontre ce plus grand coach en séduction du monde, Neil Strauss. Et il me dit : “Tu sais écrire, tu as l’air d’avoir un cerveau, tu as une tête qui passe à peu près. Lance-toi dans le business.” Donc je me dis que je vais devenir coach en séduction. Je commence à réfléchir à comment devenir un peu plus connu et trouver des clients rapidement. Et c’est là qu’arrive Next.

Donc tu n’étais pas spécialement fan de Next ?

Je connaissais le concept US, évidemment. Tu vois ces mecs, tu te dis : “Mais ils sont complètement cons, ils sont débiles, c’est pas possible !” Je sais dans quoi je m’engage en allant tourner l’émission.

Mais tu te lances quand même en connaissant l’image de l’émission ?

J’y vais parce que je me dis que c’est un programme hyper affinitaire, comme on dit dans le marketing, pour me faire connaître. Next, c’est l’émission sur la drague. Je me dis que si je participe au programme, je peux peut-être me faire connaître. Et si je me fais connaître, je peux peut-être vendre plus de coaching en séduction, ça pourrait être ma carrière. Donc il faut que j’y aille, il faut que je gagne.

Comment se déroulent le casting et les sélections ?

Je n’ai plus aucune idée de comment je tombe sur le casting. Je pense que ça doit être un casting sauvage en soirée. Mais les sélections se passent au téléphone. Tu connais le programme, tu sais qu’il faut être un peu extraverti, qu’il faut parler un peu. On est là pour faire de la télé, c’est un spectacle. Moi, je suis un grand fan de télé, mon programme préféré au monde, c’est Questions pour un champion. En 2011, je participe à mon premier Questions pour un champion [Selim a participé deux fois à l’émission et l’a remportée en 2018, ndlr] et les sélections, c’est la même chose. T’as beau être intelligent, réussir tes tests, si tu passes mal à l’image, si t’as rien à dire, si tu te mets à bégayer, que t’es trop lent, tu ne passeras pas à la télé.

C’est pareil pour Next. Ils produisent un show, tu sais comment ça fonctionne, ils veulent du clash, ils veulent du lol, ils veulent du sale, ils veulent du trash. Donc il va falloir donner un peu de ta personnalité. Au quotidien, je ne suis pas un taré. Je suis une personne très respectable avec ma chemise, mon pull et mes lunettes. Mon job est sérieux aujourd’hui mais, à l’époque, je me dis : “Je veux voir les coulisses de la télé.”

Et tu es donc sélectionné pour Next Made in France

Ouais, ils me rappellent pour me dire : “Selim, si t’es OK pour l’émission, l’enregistrement a lieu dans deux semaines. Rendez-vous devant le McDo porte de Clignancourt.”

Vraiment ? Et comment ça se passe, le jour J ?

Ouais, vraiment, ce n’est pas une vanne. Donc rendez-vous devant le McDo porte de Clignancourt avec tous tes concurrents, on va dire. Tu découvres tout le monde là-bas. Il est 7 heures ou 8 heures du matin, on prend une navette et on part sur la base nautique de Cergy-Pontoise. Il y a plein d’activités à faire là-bas, c’est en extérieur, ils peuvent filmer. Mais il caille, quand même. On est en mars ou avril.

Donc, avant le jour J, tu ne sais pas si tu vas être le dragueur ou le dragué ?

Exactement, tu ne sais pas. Tu te dis qu’il va peut-être y avoir cinq filles qui se battent pour toi. Mais non, ça, tu le découvres sur place.

Pas trop déçu de ne pas voir cinq femmes prêtes à te séduire ?

Non, pas trop déçu. C’est une autre aventure. Et même, c’est encore mieux : je voulais vendre du coaching en séduction, donc il valait mieux être dans la peau de celui qui séduit et qui sait comment séduire, persuader.

Tu montes dans le fameux bus de Next. Comment ça se passe avec les autres candidats ? Dans le programme, on voit que les participants discutent, se chambrent. Mais comment est l’ambiance entre vous quand les caméras sont éteintes ?

La réalité, c’est que les caméras ne sont pas éteintes. L’émission dure douze minutes : six minutes dehors, six minutes dans le bus. Ça va vraiment vite, le tournage dure deux heures. C’est “deux salles, deux ambiances”.

Et vous parlez de quoi avec les autres candidats ?

À l’intérieur, tout est dirigé. Les mecs et moi, on n’a rien à se dire, on ne se connaît pas, on s’en fout. Tu n’es pas vraiment là pour te faire des potes. Mais il y a une voix, comme dans Secret Story : “Bon, les gars, j’aimerais bien que vous me parliez de la première fois où vous avez fait l’amour. Maintenant, on va parler de drogue. Bon, maintenant, la taille de votre sexe.”

Ils t’ont réellement demandé ça ?

Complètement. Mais ils veulent des séquences intéressantes. Et si tu laisses cinq bonshommes comme ça, on ne va pas forcément se parler, ou juste parler un peu de foot, par exemple.

Et tu réponds à toutes leurs questions ?

Vu que la télé m’intéresse beaucoup, à ce moment-là, je suis dans le contrôle de mon image. Donc je me suis fait embrouiller par la production parce que je faisais parler les trois qui sont dans le bus avec moi – il y a toujours un candidat dehors –, et moi, je ne répondais à rien, j’esquivais tout. La question que je voulais éviter, c’était : “Vous avez couché avec combien de meufs ?” Est-ce que je vais répondre à ça, à la télé, alors que ça va rester en ligne pendant des années et des années ?

Dans l’émission, tu dois séduire Mira, 22 ans. Est-ce que tu la croises avant l’enregistrement ?

Non, tu la découvres uniquement quand tu sors du bus. C’est vraiment la surprise totale, ils savent organiser le truc. Tu ne connais ni le prénom, ni l’âge, ni rien. C’est pour ça que, sur certaines émissions, tu peux voir des participants qui ont vraiment un choc visuel.

L’émission commence par la présentation des candidats. Et on te voit dire, je te cite : “Mon délire, c’est les posts. Mais aujourd’hui, je m’occuperais volontiers de ton postérieur.” On découvre un Selim poète. C’est toi qui as proposé cette présentation ?

Non, c’est écrit. Sur tous les plateaux de jeux, télé, tu as un game master : c’est un mec qui écrit et qui se débrouille pour avoir des séquences punchy. On te demande de faire ta présentation. Et quand tu dis juste : “Je suis blogueur”, le mec se dit : “Ce n’est pas drôle, il n’y a pas de vannes, ce n’est pas trash. Qu’est-ce qu’on pourrait dire d’un peu plus con pour faire rire tout le monde ?” Donc non, ce n’est clairement pas moi qui ai écrit cette présentation. On te file un papier, on te demande de réciter ça face caméra.

Le premier candidat se fait éliminer au bout de trente secondes. Tu passes en deuxième position. Et c’est le moment des fameuses descriptions en trois points. La tienne, c’est : “Mange des bretzels après l’amour. Rêve d’être le sosie officiel d’Eddy Mitchell. Ne porte jamais de sous-vêtements”. Est-ce que, là aussi, c’est Virgin 17 qui écrit ces présentations ?

Non, là, c’est vraiment moi. Je suis Alsacien, donc je ne peux pas juste dire : “Ma nourriture préférée, ce sont les bretzels”. Il faut trouver un truc un peu plus con pour attirer l’attention. “Mange des bretzels après l’amour”, là, il y a du “what the fuck”, de la créativité, donc ça me faisait rire. Deuxième point : “Rêve d’être le sosie officiel d’Eddy Mitchell”. Ni il y a quinze ans, ni aujourd’hui, ni jamais dans ma vie ça ne peut fonctionner. Mon délire, c’est Éric et Ramzy, l’absurdité la plus totale. Et la production a validé parce que c’était idiot. Ils auraient pu me dire : “Tu te fous un petit peu de notre gueule quand même.” Je ne sais pas si, à ce moment-là, ils se disent : “Le gars est complètement con”, ou alors : “Il veut juste faire une présentation vraiment marrante.” Je ne sais pas comment ils ont évalué ça, mais c’est passé.

Et le dernier point est complètement faux mais il y a un aspect un peu sexuel. “Ne porte jamais de sous-vêtements” : si, tout le temps, toujours. Et même, je te dirais que je ne comprends pas les gars qui n’en portent pas. Mais c’est un jeu de séduction, t’es obligé de parler un peu de cul pour coller au thème de l’émission. Il y a une ligne éditoriale et tu ne peux pas arriver et dire : “Selim est chiant comme la pluie, il aime Questions pour un champion, il aimerait bien faire du sport tous les jours mais il passe trop de temps à lire des livres”. Tu ne peux pas, c’est trop chiant, pas intéressant.

On arrive à l’heure du rendez-vous. Tu rencontres Mira sur son quad. Et tu prends un Next après 1 minute et 32 secondes parce que tu ne portes pas assez bien le casque à son goût. Comment tu vis cette élimination rapide ?

Je ne m’en suis jamais remis… Non, plus sérieusement, je le prends bien parce que ce n’est qu’un jeu. Mais dans ma tête, je me dis : “Merde, je suis venu ici pour montrer que j’étais bon en séduction et je n’arrive pas à enfiler un casque de moto”, c’est lourd. Et effectivement, le casque ne s’ouvrait pas, je galérais. Et elle, c’est quoi sa réaction ? “Je veux un homme, pas un clown.” Mais quelque part, c’est ma personnalité. Je suis très sérieux dans le business mais, à côté, je suis un clown, j’aime bien faire rire les gens. Ça n’a pas collé, c’est pas grave.

T’es même pas un peu frustré de prendre ta journée et, finalement, l’aventure s’arrête en 1 minute et 30 secondes ?

Non, parce que mon objectif premier, c’était de voir les coulisses de la télé. Donc je suis content. Après, oui, tu perds une demi-journée : tu débarques à 7 heures du matin, t’enregistres à 9 heures, et à midi, t’es chez toi.

Il reste une question très importante : t’es resté 1 minute et 32 secondes donc, officiellement, selon le jeu, tu as gagné 2 euros. Est-ce que t’as vraiment touché les 2 euros et qu’est-ce que tu as fait de tout cet argent ?

J’ai investi ces 2 euros dans une action Apple qui m’a rendu millionnaire, aujourd’hui, quinze ans plus tard. J’aimerais pouvoir te dire ça, mais la vérité, c’est que le chèque, je ne l’ai jamais reçu. Sinon, je l’aurais encadré, ça aurait été trop drôle. Tu ne dépenses pas un truc comme ça, c’est un peu ton trophée de la victoire, enfin… de l’échec. Mais ça aurait été symbolique.

Et au moment de la diffusion, quelle est la réaction de tes proches, de tes amis ?

En 2009, il n’y avait pas encore autant de viralité sur les contenus. À l’époque, personne ne me parle de ça à part peut-être une ou deux personnes. J’en ai juste parlé à ma petite sœur pour la faire marrer.

Mais tous ces extraits ressortent encore aujourd’hui…

Ils ne sont pas ressortis avant 2014-2015, car des épisodes ont commencé à être rediffusés et facilement retrouvables sur YouTube. Ça a commencé à s’emballer à partir de 2017-2018. Un youtubeur, Mastu, a fait une des vidéos de réaction à des épisodes de Next. Moi, je reste logique avec ma stratégie d’attention et je l’ai interpellé sur X/Twitter. Et j’ai eu énormément de trafic sur mon site et sur mes vidéos. L’idée, c’est de se dire : “Oui, ce n’est pas bon pour mon image, mais je peux convertir ça en trafic d’une manière ou d’une autre.”

Il y a eu Mastu mais, tous les ans, il y a MalaiseTV, La Cringerie, et toutes ces pages drôles, dont je suis friand, qui ressortent la séquence. Je suis consommateur de toutes ces conneries du Web où tu te dis : “Les gens sont vraiment cons.” Mais, de temps à autre, c’est toi, le con. C’est comme ça, c’est le jeu. Mais ça ne m’a pas empêché de faire ma vie, de sortir des bouquins sur la séduction. Ça ne m’empêche pas aujourd’hui de bosser avec toutes les boîtes avec lesquelles je bosse. Mais, de temps à autre, tu as quelqu’un qui débarque dans ta vie, qui ne te connaît pas et qui t’envoie un message sur Instagram : “Bravo pour ta première place.”

Quinze ans après, qu’est-ce que tu retiens de tout ça ? Et toi, tu en es où, maintenant ?

Quinze ans après, pour moi, c’est un souvenir rigolo, ça fait un peu de trafic sur mon blog où je raconte les coulisses de l’émission, mais ça ne m’a pas marqué plus que ça. Je parle beaucoup plus de ma victoire à Questions pour un champion, en 2018. C’est beaucoup plus marquant. C’était plus compliqué et je ne me suis pas fait virer immédiatement, j’ai duré plus d’1 min 30 s.

J’ai arrêté d’être coach en séduction en 2018. Aujourd’hui, je forme des gens à l’écriture publicitaire, comment faire pour écrire et vendre en ligne. Et je forme les prochains concepteurs/rédacteurs sur les mots magiques. Tu vois, de l’eau a coulé sous les ponts. Et j’ai sorti Le Guide du copywriting en 2021, qui s’est vendu à 13 000 exemplaires. C’est un best-seller donc je suis super content. Et mon cinquième livre, Les Mots magiques, sortira en octobre 2024.